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«(...)
Elle vivait. Et, comme à chacune des fois, elle
voulait d'un toujours qui dure longtemps.»

À cause du chaos

regarde comme la langue
de la plume mouille le papier
provoque un chaos
je défroisse les lettres elles deviennent mots
volettent vers le haut
à la source esquisse ils s'articulent
en buissons vagues bancs d'étoiles saumons
s'ajoutent cristallins aux regards longs silences
assemblage d'îles en grand continent
les paupières des pages effeuillent mes yeux
ailes à bruire à brasser
importance et tornade
de mes pas épines dans leurs pas d'ondes
les lambeaux face au soleil lèchent
le boire mots de chacun des livres
regarde comme difficile
je soulève le vent à contre-jour
éreintée d'ouragans ils s'ordonnent à ma marche
alors
les mots voyagent trempés de mes nuages

© Marie Mélisou
http://www.ecrits-vains.com/editoriaux/marie_melisou/2.htm

 

Simple

un long moment escargot
au royaume des questions qui s'osent
oublier dessus se trouver dedans
ne pas s'arrêter seulement
sous l'important qui tient
la treille des mots à croire
et arriver à se suivre
malgré tout
comme les champs le savent
en herbe simple

© Marie Mélisou 10 septembre 1999
http://franceweb.fr/poesie/forum128.htm

 

Abreuver les souffles

« Tout cela, vois-tu, c'est un jeu que nous jouons.
Mais notre cœur et notre vie servent d'enjeux, et ce n'est pas
tout à fait aussi plaisant que cela en à l'air. »

G. Sand

Elle n'était plus personne. Elle se taisait depuis si longtemps. Mélangée à
l'infini des nuages. Parfois, même la crainte qu'elle s'inspirait était un
abîme à ne rien trouver.

Dénoncée de vivre - elle avait peur d'être dénoncée de vivre - elle se
nourrissait de murs gris étroits et d'un pain à la douleur tant elle se
retenait d'exploser. La vie de chacun de ses jours jouait à chas car elle
restait tapie.

Il faisait peur souvent. Nuit. Puis jour. Mais au final elle demeurait
embusquée. En une alternance d'attentes.
Elle espérait guettait se languissait.

Bientôt serait l'heure d'un temps trop coagulé. Où la saison avancerait
d'un pas. Elle pourrait agir.

Alors le jour et la nuit se mélangeraient. La vie disparaîtrait autour
d'eux - ceux d'en bas - l'espace d'un temps qui contiendrait le vide le
plus parfait. Un temps terrible. Celui des premiers roulements effrayants.
Celui des premières gouttes écrasées sur leurs peurs. Et ils l'auraient
bien cherchée. Car ils ne lui accordaient pas l'amour qu'elle jugeait
mériter.

Après quelques éclairs, elle pourrait bondir et abreuver de perles les
souffles d'en bas. Comme à l'inverse elle laissait venir à elle l'éternité
qui monte.

Pleuvoir. La pluie. Elle. Enfin, une fois encore elle deviendrait
quelqu'un. Être cette eau d'angoisse qui tombe mouille et crève ses propres
étincelles. Joie.

Elle, si redoutable à se défendre des cheveux du soleil, ceux défaits en
mèches répandues partout qu'elle hérissait d'épines arc-en-ciel. Les
asperger une nouvelle fois de ses pleurs heureux serait sans nul autre
bonheur.
Elle, qui aimait tant ses étendues bourrasques quand celles-ci étaient là
et ailleurs aussi, s'essayait patiemment à cesser de respirer durant des
temps torrentiels. Traîner se prolonger larmoyer encore et encore de
sanglots restés habillés en insufflant et soufflant doucement allongerait
peut-être son règne.

Ainsi elle était quelqu'un. Elle vivait. Et, comme à chacune des fois, elle
voulait d'un toujours qui dure longtemps.

© Marie Mélisou septembre 1999
http://www.ecrits-vains.com/editoriaux/marie_melisou/3.htm

 

Péninsule pays de l'entrée

« Pour que tu m'entendes
mes mots
s'amenuisent parfois
comme les empreintes des mouettes sur les plages. »

Pablo Neruda

perdue de raisons égales
marche de si loin
j'écris des lettres du pays de l'entre

l'instance du réveil n'est pas
heurte déchire dessoude l'instinctuelle

entiers dans un feu des lingots
- immense interdit parce qu'un jour d'il
y a longtemps je fus un miracle -
pleurent des larmes dorées et se battent
en flammes lumière les vigilances débusquées

deux mares en obscures yeux
de quoi sceller ma bouche
d'anciens habits de baisers
chahutent sur leurs vagues lorsque
descend la marée la vase empeste
péninsule colère
je marche de si loin en écrivant des lettres
du pays de l'entre

péninsule gangrenée
j'attends toutes les heures
sans m'abriter - que de décombres ! -
environnées de pages qui volent de vraies distances
au propre aux nues

j'écarte mes pas du ciel crépuscule
ils étendent des voiles improbables et révélées
l'eau chante de remonter la terre

entre colline et falaise
à vol d'oiseau une crête à corneilles
par raccroc percer leurs clameurs

jamais ne se délie l'acceptable mi aigre mi doux
dédoublement anguleux et étouffant
des mots nés au pays de l'entre
en marche de si loin
sur la péninsule colère

être prise doucement avant de sursauter
à l'entre nœuds
une escapade à cœur à la gorge
voltige le sang féroce d'un galop tuant
se dissipent des images les combats ma colère

je regarde droit le moment de plonger nue
à veines battantes
et les courants en racines torturées polissent
chacune des gouttes égarées

© Marie Mélisou
http://www.ecrits-vains.com/editoriaux/marie_melisou/4.htm

 

Forget-me-not

Pour G.

pour l'instant
le monde a la forme de sa couleur
forget-me-not
des soirs jusqu'aux branches
bout du jardin son teint au tien pareil
le mur dompté consomme le temps détruit
pour l'instant
tout va au bout de la lumière
pour l'instant
une nouvelle plaie ne pourrait m'empirer
au bout de mon nez un chaud silence sacré
couleur forget-me-not
si mystérieuse l'âme en secret
ennemie de ma charge en pluie et diamant
pour l'instant
le bout est de tout si proche
pour l'instant
s'appliquer à grandir sur sa chaise
forget-me-not
une chanson myosotis de schiste et de lave
résonne sur quatre murs
à marcher soleil en bandoulière
pour demain

© Marie Mélisou octobre 1999
http://www.ecrits-vains.com/editoriaux/marie_melisou/5.htm

 

   
   
   
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