«
Tout cela, vois-tu, c'est un jeu que nous jouons.
Mais notre cœur et notre vie servent d'enjeux, et ce n'est pas
tout à fait aussi plaisant que cela en à l'air. »
G. Sand
Elle n'était
plus personne. Elle se taisait depuis si longtemps. Mélangée
à
l'infini des nuages. Parfois, même la crainte qu'elle s'inspirait
était un
abîme à ne rien trouver.
Dénoncée
de vivre - elle avait peur d'être dénoncée de vivre
- elle se
nourrissait de murs gris étroits et d'un pain à la douleur
tant elle se
retenait d'exploser. La vie de chacun de ses jours jouait à chas
car elle
restait tapie.
Il faisait peur
souvent. Nuit. Puis jour. Mais au final elle demeurait
embusquée. En une alternance d'attentes.
Elle espérait guettait se languissait.
Bientôt serait
l'heure d'un temps trop coagulé. Où la saison avancerait
d'un pas. Elle pourrait agir.
Alors le jour et
la nuit se mélangeraient. La vie disparaîtrait autour
d'eux - ceux d'en bas - l'espace d'un temps qui contiendrait le vide
le
plus parfait. Un temps terrible. Celui des premiers roulements effrayants.
Celui des premières gouttes écrasées sur leurs
peurs. Et ils l'auraient
bien cherchée. Car ils ne lui accordaient pas l'amour qu'elle
jugeait
mériter.
Après quelques
éclairs, elle pourrait bondir et abreuver de perles les
souffles d'en bas. Comme à l'inverse elle laissait venir à
elle l'éternité
qui monte.
Pleuvoir. La pluie.
Elle. Enfin, une fois encore elle deviendrait
quelqu'un. Être cette eau d'angoisse qui tombe mouille et crève
ses propres
étincelles. Joie.
Elle, si redoutable
à se défendre des cheveux du soleil, ceux défaits
en
mèches répandues partout qu'elle hérissait d'épines
arc-en-ciel. Les
asperger une nouvelle fois de ses pleurs heureux serait sans nul autre
bonheur.
Elle, qui aimait tant ses étendues bourrasques quand celles-ci
étaient là
et ailleurs aussi, s'essayait patiemment à cesser de respirer
durant des
temps torrentiels. Traîner se prolonger larmoyer encore et encore
de
sanglots restés habillés en insufflant et soufflant doucement
allongerait
peut-être son règne.
Ainsi elle était
quelqu'un. Elle vivait. Et, comme à chacune des fois, elle
voulait d'un toujours qui dure longtemps.
© Marie Mélisou
septembre 1999
http://www.ecrits-vains.com/editoriaux/marie_melisou/3.htm